lundi 6 avril 2015

La pollution urbaine : un danger pour le cerveau des enfants

 

La pollution : un danger pour le cerveau des enfants

Par figaro iconThomas Cavaillé - le 31/03/2015 
 
 
Les populations urbaines très exposées à la pollution pourraient développer des troubles du comportement et des capacités cérébrales réduites, indique une étude.
Les polluants atmosphériques ne sont pas qu'accusés de risques cancérigènes chez les adultes et de problèmes respiratoires chez les enfants, ils perturberaient aussi le développement de l'embryon. Selon une étude publiée fin mars dans la revue en ligne Jama Psychiatry, les enfants ayant été fortement exposés aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) à l'état de fœtus auraient des impacts visibles sur le cerveau, qui pourraient se traduire par des troubles du comportement et une altération des capacités cognitives.
Derrière le nom barbare d'hydrocarbure aromatique polycyclique se cachent des molécules d'une très forte toxicité, qui n'ont aucun mal à traverser le placenta pour endommager le cerveau fœtal. La majorité de ces neurotoxiques atmosphériques se forment par la combustion d'énergies fossiles, comme le bois et le charbon, de matière organique donc de tabac, et de carburant automobile. La quantité d'HAP dans l'air est donc fonction de la pollution et les citadins y sont plus confrontés.

Qualité de l'air pour l'embryon puis pour l'enfant

Menée par Frederica Perera, directeur du centre pour la santé environnementale des enfants à l'université de Colombia aux États-Unis, l'étude a été réalisée sur 720 femmes enceintes des minorités urbaines de New York, se définissant elles-mêmes comme «Africaine-Américaine» ou Latino-Américaine». Non-fumeuses pour ne pas fausser les résultats, les futures mères en fin de grossesse ont enregistré pendant 48 heures leur taux d'exposition aux polluants à l'aide d'un appareil de surveillance de l'air.
Le suivi de l'expérience s'est ensuite effectué sur 40 enfants issus de ces grossesses, nés entre 1997 et 2006. Choisis aléatoirement, 20 d'entre eux avaient été exposées à des doses faibles d'HAP pendant leur développement embryonnaire, les 20 autres à des doses élevées. À l'âge de 5 ans, leur propre taux d'exposition aux HAP a été mesuré par analyse d'urines, et entre 7 et 9 ans ils ont tous passé un IRM (imagerie par résonance magnétique) du cerveau, des tests comportementaux et de QI.

Les PAH altèrent la substance blanche du cerveau

L'exposition aux polluants provoquerait des troubles sévères chez l'enfant, notamment un ralentissement des capacités intellectuelles et des problèmes de comportement comme une hyperactivité, un déficit de l'attention et un mal-être social pouvant être à l'origine de violences ou de dépressions. D'après les IRM, c'est en impactant directement le cerveau que les polluants induiraient ces troubles, et les répercussions seraient proportionnelles à l'exposition.
En effet les IRM ont montré une diminution importante de la surface de la substance blanche du cerveau en cas d'exposition aux HAP. Plus l'exposition était importante, plus la substance blanche était réduite, et plus l'enfant présentait des troubles du comportement et un ralentissement des capacités mentales lors des tests. Lorsque l'exposition aux HAP était prénatale (à l'état d'embryon), la réduction de substance blanche était concentrée sur l'hémisphère gauche. Quand l'exposition était forte pendant l'enfance, c'est la zone préfrontale du cerveau qui présentait une forte diminution.
«La substance blanche forme un réseau de fibres qui assurent et protègent le transport de l'information entre les corps cellulaires des neurones de la matière grise. Si cette substance est altérée, le message est perturbé, moins rapide, et le réseau fragilisé», explique Bernard Sablonnière, professeur de neurobiologie à la faculté de Lille. Si la substance blanche est réduite dans la partie gauche du cerveau, qui contient entre autres les zones impliquées dans le langage, et dans la région préfrontale, zone de la décision et du raisonnement, les effets sur le comportement peuvent être majeurs.

Peut-être d'autres particules à accuser

«Les HAP ne sont que des marqueurs de la pollution, de nombreux autres composés dangereux peuvent être à l'origine des effets observés, comme les nanoparticules ou les gaz», prévient Pascale Chavatte-Palmer, chef d'équipe en biologie du développement et reproduction au centre INRA de Jouy en Josas.
L'équipe de Frederica Perera compte néanmoins poursuivre les recherches avec un échantillon plus important pour valider ces résultats. Si ceux-ci sont avérés, que les HAP ou d'autres particules soient mis en cause, l'enjeu sera de santé publique puisque la moitié de la population est aujourd'hui urbanisée et confrontée quotidiennement à la pollution.
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Frédéric, 47 ans et citoyen du monde.